vendredi 2 avril 2010

Echosonnet





J'ai vu des cœurs baveux, j'ai lu des corps bavards,
des textes savonneux aux en-têtes tranchés
dans le gras d'un cochon d'où l'art n'est qu'un buvard,
la bouche où nous couchons l'égout de nos trachées.

Tousse !
Tousse donc !
Crache !
Vomis !
Tous,
nos miasmes sont les flotteurs de ces lignes de conduite
qu'on a voulu nous inculquer
et que l'on voudrait retransmettre
sur l'air bien connu de l'eurovision
pour faire croire
que nous y croyons
et que dans nos attitudes induites
se trouvent les postures à suivre
à prendre
à pendre
à suspendre
comme la charcuterie
de nos nerfs dilacérés par les dissections médiatiques au grand vent du vide qui prend la place
la place du rien
et qui voudrait se calquer
sur des ondes positives
alors que notre empire
empire
– empire de la colle Cléopâtre et de ses yeux en amande,
saint Ampère cathodique de la génération télévisuelle –
et s'effondre
et sait fondre comme un plomb que rien ne transmutât.

J'écoutais le chant triste en son implorescence,
de tous ces moitié-Christ mais inressuscités,
dont je faisais partie dans toute l'innocence
des êtres départis d'un amour suscité...

Cécité !
Ces cités sont
Babel
pas belles
poubelles
incinérations
recyclage
réhabilitation
l'ombre d'un reflet narcissique
au miroir de ce qu'elles furent en réalité
– des villes ratières hantées par le fantôme
de l'enfant-Homme
dans toute sa banalité –
oubliant leurs ambitions existentielles
leur volonté de s'imposer pour ce qu'elles devaient être
et non paraître
rêvant avec plus d'aisance
qu'un siège
et de tant d'années de disette pour n'accoucher que de merde...
de tant de privations
pour ne pas se livrer
se mettre en livret
dans la bonne livrée
en oubliant l'ivraie
pour ne garder que le petit grain
qui pousse
tous
tousse
mais parvient.

J'étais un papillon sur des yeux d'essuie-glace,
qu'en un geste pillons de ses vrais sentiments,
J'étais une phalène en sa lumière grasse.

Grasses
parfums
provence
essences
flores intestines
faunes sales et sueurs sœurs de crasse
organes
organismes défunts
un cimetière qui sent bon le thym
la garrigue et le romarin
La Bruyère
– écrivain –
la face cachée de la callune
et la sphaigne spongieuse
qui vous aspire
qui vous inspire
comme le whisky qui pousse dans sa tourbe
notre monde végète
depuis sa création
et nous ne parvenons qu'avec difficultés à le sentir
à le humer
à l'aimer
à le ressentir
à s'en ressortir
à croître dans le droit chemin
autrement qu'en fût
en taillis
nos vies ressemblent à des maquis mal jardinés
ce doit être ça, la « nature humaine » !

Et j'ai perdu l'haleine à courir vers la grâce
d'un amour innocent qui nous fuit forcément...
Ce n'est pas dans son sang qu'on en trouve la trace !

Faux-cils !
Géodésie !
J'ai au désir attaché le boulet de canons désarmants
et le souvenir qu'en ont tous les amants :
celui plus beau que ce qu'il ne fut jamais
celui sessile
des coquilles mortes d'un rocher.

5 commentaires:

Murièle Modély a dit…

j'aime beaucoup...
"Tousse !
Tousse donc !
Crache !
Vomis !"

il y a une urgence, un rage, une force dans ses mots jetés, éructés sur la page (enfin l'écran :)

Michel P a dit…

Oui ! Ecrire c'est comme une envie d'pisser, non ? :)

Murièle Modély a dit…

de pisser de vomir de cracher...
de vider son corps de tous les mots qui nous débordent ;)

Morgan a dit…

Deux styles se croisent, s'entremêlent et trouvent ensemble une voie très originale. Bravo, amigo !

Michel P a dit…

Merci Morgan ! J'étais sûr que tu kifferais ce texte. ;-)