mardi 29 mars 2016
Grand Bassam (republication de ce texte de 2006 en l'hommage de cette cité meurtrie)
Cocos coupées à la machette,
Dis, tu m'achètes ? Dis, tu m'achètes ?
C'est pour dix balles CFA...
C'est pour queue dalle à la plaïa...
Il est midi à Grand Bassam,
Lorsque ce petit bout de femme
Sabre les fruits de son pays,
A mes pupilles ébahies...
Il est midi à Grand Bassam,
Le soleil darde de ses flammes,
Le sable des plages privées
Et la sueur des peaux bronzées.
Mais les nuages d'équateur
Viennent charger de leur lourdeur,
La baie fermée sur l'océan,
La presse d'un air oppressant.
On se croirait à angle droit,
Au moins à sa moitié, je crois,
Tant les degrés se superposent
Aux chaleurs dont ils sont les causes.
Je me lève du transat',
Je me lente, aimant avec hâte,
Vers l'eau salée qui, comme un lac,
Semble une soupe à nos hamacs...
La plante de mes pieds me brûle,
A vingt-huit est la grande bulle,
Elle est pourtant rafraîchissante,
Cette eau si pure et transparente...
Il est midi à Grand Bassam,
Et des heures à nos grands dams,
Se passent en baigneurs modèles
Dans l'eau ou les couleurs se mêlent :
Le blanc, le noir et l'océan,
Le rire dilué des enfants,
Il est midi à Grand Bassam,
Ainsi s'humidifient nos âmes !
Les ananas nous sont fragrants,
Et tous leurs jus dégoulinants,
Quand on les grignote en tournant,
A la façon d'un cuisseau lent.
Et le soleil est insolent !
Et le sommeil est un saut lent !
Puisque nul ne peut deviner
Quand dans la sieste il va sombrer.
Les cocotiers se font la malle,
De Grand Bassam, la coloniale,
Pays qui, de trois capitales,
Côte d'ivoire est la vénale !
Reste de celle-ci, fantôme,
Le destin flou d'un carcinome.
Il est midi sur Grand Bassam,
J'en rêve encor après les drames...
Mes vers d'escales s'escaladent,
Comme latitudes malades,
Mais des rémissions télévisées,
En sont l'image imaginée.
dimanche 27 mars 2016
Demain
Demain, le soleil ne se lèvera pas : il restera dans sa coquille d'huître à flétrir de baisers qu'il ne donnera pas. Le jour restera fermé comme une serrure à double tour et comme un disque au ralenti, comme un diamant posé rubis sur l'ongle à l'avatar d'où nos âmes rodent afin de s'en délivrer.
Demain, le soleil ne se lèvera pas : il aura supporté les clous et les blessures des torturés communs, des pauvres qui n'ont jamais voie de Cité, des crucifiés à la fleur du fusil et des crucifères embrassant les bouches des canons.
Demain, l'urne élira ses monuments funéraires, dressera de gigantesques tombeaux à ses morts hasardeux, et sanctifiera dans une grande embrassade, en l'absence de gène un plaisir sulfureux.
Alors, ignorant le fils du père, l'enfant de la mère, on sabrera ces petites têtes sans pagne afin qu'elles n'aient plus d'origine contrôlée.
Hier, j'ai visité le ventre des porcs afin de vérifier qu'ils étaient conformes à toute religion... Ensuite, je me suis occupé des textes sacrés : la Bible, l'Évangile et le Coran. J'aurais préféré comprendre le chinois et ses vieux grands philosophes, mais on ne fait pas du sperme avec du sang.
Demain, le soleil ne se lèvera plus comme avant : des monstres lutteront contre les résurrections, des assassins chercheront à tuer des enfants, et la lumière éblouissante de Pacques éclairera tous les meurtres en devenir.
Le doigt que je fais glisser sur tes rouges lèvres est l'absolu symbole amoureux des combats qui nous attendent, et dont la féminité criarde est la bouée salvatrice en laquelle il m'est donné de me raccrocher.
Demain, le soleil ne se lèvera pas, mais la lune triomphante éclairera le chemin des résistants.
Dany l'heur rouge
Daniel Cohn-Bendit = Danton chien bidel
(Le bidel est le capitaine d'armes, l'autorité sur un bateau.)
Daniel Cohn-Bendit : le nouveau Danton...
samedi 26 mars 2016
Monde et Poésie
Nos mondes personnels sont la
conjugaison d'inextricables liens entre de petites choses
individuellement insignifiantes, mais dont l'harmonie constitue
l'édifice fragile assurant une beauté fulgurante et fugace et
précaire. Nos mondes sont comme une poésie : ils se doivent de
trouver la bonne résonance, le bon rythme et l'équilibre
indispensable à leur donner encore un sens.
Et c'est ainsi, en toute réciprocité,
qu'une nouvelle poésie constitue d'elle-même un nouveau monde.
mardi 22 mars 2016
C'était au temps
C'était au temps défunt d'une Europe
haletante,
au temps perdu des voix, des éclats de
Bruxelles,
et les éclats de bombe ont ce que
l'abrupt scelle
en ces éclats de vers servis en
dilettante.
C'était au temps du rêve à présent
enterré
sous les sombres gravas de ces sourds
attentats,
sous les ombres de nuit d'un odieux
potentat
se réclamant toujours de faux dieux
atterrés.
Répondant à l'appel des douleurs
citoyennes
il m'a fallu la pelle à ramasser les
maux
et les morts et la peine, afin d'écrire
un mot.
Il m'a fallu la lettre à cité si
doyenne,
et ce noir capital à saisir ce
qu'impriment
en nos front redressés quelques
chasseurs de primes.
lundi 21 mars 2016
Défendu
De longs figements de baisers
basaltiques
ont creusé dans l'airain de nos corps
statufiés
des tourments facétieux et des maux
cathartiques
auxquels l'eau de tes yeux porte un
flot pacifié.
Je ne sais si l'allant dans cet
immobilisme
a cédé son ressort à des mares
stagnantes,
ou si l'évocation de notre nombrilisme
aura su la remuer comme une onde
feignante ;
mais j'entends clapotant, les pieds des
poésies
qui soudent les serments devinés par
l'Oracle,
et dont certains voyants dans leur
grande Hérésie
se seraient revêtus comme d'un grand
miracle.
Les mots ne sont jamais de nos réalités
:
ils sont les ouvriers serviables du
fantasme
et recouvrent d'un drap de syntaxe
allitée
la crise d'égotisme ainsi faite enfant
d'asthme.
Et pourtant j'abandonne à l'idée
d'effraction
la clé de ton puzzle en kaléidoscope
où ta rousseur détache en d'infimes
fractions
ta beauté que s'arrachent deux, trois
périscopes.
Je t'ai décapitée, mon en-tête
amoureuse,
avec un Sans-souci fleurant la terreur
et la quête abrutie d'une bourgeoise
heureuse
alors que j'accumule en ton sein tant
d'erreurs.
J'ai refait tant de fois ton portrait
mon ultime
et rempaillé la chaise où ton cul se
posa,
que je ne puis dès lors me poser qu'en
victime
en mots, art suicidaire, et que là
crime osa !
Mais quarante-sept ans sont bien trente
de plus
que l'âge du rêve à ce point abimé
que d'amours innocentes je ne rêve
plus
sans flétrir à l'instant de relations
mimées.
Le rasoir de la vie m'avait gravé la
ligne
en ma main d'éconduit, le chemin
défendu
qu'on visite pourtant, la vibration
maligne
où les sexes se trouvent à deux des
fendus.
vendredi 18 mars 2016
Brazil
Des oiseaux — glas d'odeur —
parfument les journaux
comme du papier-cul ; le reste de leurs
plumes
engraisse le pilon des papiers au
fourneau,
mais je garde du Rouge un marteau sous
l'enclume.
Et je garde prétoire à la folie
commune,
à la Folie-Neubourg où l'amour se
consume,
au mur des fédérés de la pauvre
Commune,
ou, regardant mes doigts, à ce qu'un
quinconce hume.
J'en viens donc à chercher des loyers,
qui bailla
Salvador Allende dans le pays tout
contre,
aux camionneurs soumis à la sombre
NSA,
j'en viens donc à l'ultime, à notre
ombre rencontre.
Si le pays titube en passant l'arme à
droite,
et que de bleues scories virent du
jaune au vert,
faute n'est qu'à la gauche aux envies
maladroites
en vain de s'éviter ses odieux
découverts.
Mais l'accent circonflexe est sur tous
les fossiles,
et l'horrible indécence, elle, empire
un peu plus,
dans un méandre aqueux d'une humeur
indocile,
il me faut retrouver ce qui chez moi
vous plut.
Peu m'importe qu'il vente ou qu'il
saigne ou qu'il pleuve,
étouffé d'un tropique où où
j'enseigne ma Zone,
oui, je contesterai les pets d'un
roman-fleuve
abusant du courant de ma fibre amazone.
J'ai voulu pour écrire éviter les
récifs
de mon verbe natal que d'autres
tarzanisent,
oubliant de l'article un rôle en leurs
poncifs,
ce sont eux les abstrus qui pourtant
galvanisent.
Ce sont eux les verbeux de petite vertu
qui promulguent les lois que d'emblée
je contourne
à l'aide de la rime en laquelle un
vers tue,
comme au brio de Jeanne, héros de ce
qu'on tourne.
J'ai fait de mon Poème une cage dorée,
ses barreaux éclatants sont ma jungle —
un asile —
et le fourmillement de sa flore adorée,
plainte carnivore, est un cri menu :
Brazil !
mardi 15 mars 2016
L'angoisse
Si dire en quelques mots ce serpent
constricteur
était dans les moyens de mes hauts et
mes bas,
je dirais du Poème où dès lors je
m'ébats,
que c'est l'acte essentiel où
s'étouffe cette heure.
Et la ligne serpente au creux de nos
deux mains,
comme un ruisseau de sang vers
l'embouchure vaine
attendant l'oppressant fleuve de la
déveine
au rendez-vous de l'air de dealers
lendemains.
Puis, venant, s'enroulant de nos reins
à la gorge,
elle enserre en ses ronds sirupeux de
spirale
afin de nous extraire un odieux dernier
râle.
L'angoisse est le métal dont l'enfer
est la forge
et dont l'acier trempé dans l'aigreur
de l'alcool
est le collet monté des passions qui
nous collent.
vendredi 11 mars 2016
Aurigyne
Je ne suis pas Crassus, abreuvé d'or
fondu,
je ne suis pas crasseux non plus de cet
amnios
dont sont enveloppés ceux qui dehors
font dû
de leurs maternités sans corps ni eaux
ni os.
Je ne suis pas non plus privé de
l'ombilic,
et mes rétrocessions à ces femmes qui
comptent,
ont les valeurs unies des amours
faméliques
auxquelles j'ai souscrit, qu'en vain je
raconte...
Or, j'ai conçu des murs d'enceinte
époustouflants,
destinés au Mektoub afin de m'épargner
la quête aux pauvres saouls dont les
vers s'essoufflant
ne laisseraient qu'à colle une énigme
à renier.
Je suis sorti d'un ventre où la morve
en guirlande
a baptisé mon front d'un baiser
déhiscent,
s'accrocher à Tara, buste d'exsangue
Irlande
est comme pendre à Sein d'où chacun voit son sang.
est comme pendre à Sein d'où chacun voit son sang.
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