lundi 26 septembre 2016

Ligne devis



Goûte au baiser secret de la mélancolie,
dont ton âme s'épanche en glissant mollement
sur le bois de la planche où parjure aux serments,
tu gravis les degrés de la douce folie.

Nul ne cherchera plus ton obscure origine ;
en dressant ton bûcher, nous chanterons tes vers.
Un bourreau, deux bouchers, trois poètes pervers,
saleront ta bidoche en purs Moravagine.

Alors, tu sombreras dans l'obscur labyrinthe
où les fauves du Cirque oubliant leur nature,
à grands coups de faiblesse, à grands coups d'imposture,

incessamment sans doute et sans cibles s'éreintent,
organisant la mort d'un passé qui les hante,
et d'obséquieux cercueils revêtus d'amarante.

dimanche 25 septembre 2016

Capiste




Je regrette Océan mes pluies du Finistère
Et leur grand courant d'Ouest où les filles recoiffent
Un rouge de leur lèvre où le ciel peut se taire,
Écartelé par des rougeurs qu'on boit sans soif.

Je pleure mon pays tout pétrifié de sel,
Et ses quais désertés par la misère adulte,
Alors que son enfance en suintant des aisselles
Essaie de lui gommer ce qu'on lui fit d'insultes.

Je sais ce doigt de Dieu tendu vers l'Amérique,
Afin de l'approcher dans un ultime échange,
Et des plafonds de mes chapelles hystériques
Un peu de ces passions qui hantaient Michel-Ange.

Je suis l'humble chanteur d'un lointain bout du Monde
Où la lumière est folle et le vent persistant,
Où toute femme en sa beauté m'est la Joconde
Au sourire interdit mais au verbe insistant.

mercredi 21 septembre 2016

Porcelaines




Vautré sur un radeau d'algues cancérigènes,
un cadavre embaumé parfumait l'air marin.
Ses chromosomes mûrs avaient largué leurs gènes
aux hasards des courants sur des brisants d'airain.

Si sa peau s'écaillait comme une vieille écorce,
était-ce afin — poison — d'en polluer les eaux ?
Ou d'aller d'aller poignarder comme en vendetta corse,
un fantôme en sa mue dont on brisait les os ?

Nous ne sommes pourtant que des morts en sursis,
ballotés par des jours à l'écume astringente
et par des flots boueux sur des mers de soucis.

Nous voguons nous aussi sur l'épave indigente
à laquelle on s'attache, ainsi qu'à la baleine
où Jonas découvrit d'avalées porcelaines.

dimanche 18 septembre 2016

Kassandre 6




Votre nom s'habille de nuit ;
Ta beauté maquillée de lumière
Extirpe un lecteur de l'ennui
Dont on sait l'intention première.
Et votre habitude malsaine
habite enfin mon intérieur
de tes imprécations obscènes
où va naissant l'être inférieur.

Rampant comme une renoncule,
un lézard moderne innocente
un serpent qui nous inocule
un venin de pas dans nos sentes.
Et l'orvet reconnu martyre
avec ses pattes arrachées
ne vaut pas plus que ce qu'on tire
à corde insoumise à l'archet.

Toi ? Petit bouton d'or des prés,
vous préserve Madame en moi
des déprédations de l'après,
puis des chauds effrois de l'émoi.
J'aime les îles parcellaires
allant constellant vos pommettes,
et l'hydre absolument stellaire
allumant ton feu d'allumette.

Vous êtes l'Art que je tutoie,
la perfection du trait, du style,
et l'Amour — dès que je vous vois —
peuplant d'un geste un péristyle.
Or, sois ma Muse, une onde vive
où se mêle mon encre au vide,
où votre visage ravive
un souvenir d'amante avide.


© Kassandre Modèle

mardi 13 septembre 2016

Kassandre 3



J'ai des fils de fer tendus sur le corps
de ma métropole, est-ce à ton image ?
Elle, elle envahit, forme mon décor,
accord démineur puisque c'est dommage,
et que c'est dans ça que l'oiseau picore.

Ainsi vont les vents que les temps baptisent
et maugréent du son mielleux que lèche harpe,
autant que ton feu que mon cœur attise
au foyer douteux dont tu fis l'écharpe,
usa la gorge où s'enrouent nos hantises.

Et les spasmes gris des moteurs acides
imprimant leur rythme aux toux salutaires,
ignorent de toi ce geste impassible
ordonnant aux fantômes de se taire,
intimant au fou d'être extra-lucide.

Il n'y a que ta bouche extrapolée
dont la salive épuisée m'est la source
extrapolaire aux jetées épaulées
par les mots massicotés d'épars ours,
à laquelle on s'étoile en vers pilés.

C'est en défaisant les toiles des rêves,
incidemment, que j'appris à tisser
celle où d'à régner sur des nuits sans trêves,
on se déconstruit de feux attisés
par l'humble phalène en nos vies si brèves.

jeudi 8 septembre 2016

Kassandre 4



J'ai posé de l'écharde une goutte de sang
sur des vieux manuscrits de détresse et d'emphase,
où l'ombre d'un poète à ce point indécent,
frise à ta chevelure un parfum de ses phrases.

Et l'épine de rose a criblé ton visage
innocent de milliers de ces tâches de rouille,
à ce point qu'il faudrait fuir en ton paysage
afin d'en recueillir quelques unes qui grouillent.

Alors, on finirait dans le bleu de ta vue
comme dans un bassin d'oxygène interdit,
des gens me payeraient sur la cour imprévue
des miracles offerts aux poètes maudits.

De bon matin le train qui fit de rois des mages,
où le soleil se lève et les nations se couchent,
offre entre la mitraille en douloureuse image,
un peu de l'écarlate ornant ta tendre bouche.

Inutile à toute heure et pourtant essentiel,
un écrivain se tord sur tes traits lumineux ;
il a fait de ton cas son drame existentiel,
un problème gordien qui n'en a que des nœuds.

Je vis au jour le jour, un peu comme un Maasaï,
le futur n'a pas place en mes glauques pensées ;
les traverses ne sont qu'au défilé de ses rails
un chemin barbelé qui n'a rien dépensé.

Plus rien ne nous arrive et la nuit s'écartèle
en se voulant la pute en laquelle on s'oublie,
sans que rien ne soit plus froissement de dentelles,
Jarretière épanouie sans qu'on soit anobli.


© Kassandre Modèle