dimanche 30 octobre 2016

La Monaco du Nord





Mon cœur déambule sans but
comme les passants sur Granville,
il n'a plus le moindre attribut
si ce ne sont sautes serviles.
Et le courant marin l'emporte
au gré de vagues mélopées
qui — soucis salés — l'insupportent
à moins que de l'envelopper.

Les promenades surpeuplées
boivent le soleil de l'automne
ainsi qu'un filtre où décuplées,
sourdent des foudres qui l'étonnent.
Et versant sur le flanc rocheux
de notre Monaco du Nord
un liquide aux éclats fâcheux,
la lumière écoule et s'honore.

L'égorgé cri des goélands
martèle incessant les tympans
d'un rythme dont l'écho est lent
mais dont la clameur se répand.
Et dans ces nuées pisciformes
aux battements d'Elle incivile,
un cœur esseulé se déforme
ainsi qu'une foule à Granville.

mercredi 19 octobre 2016

Les fruits du testament




J'ai mal dormi chez Maldoror
en lisant tout du Dix-neuvième,
imaginant des tas d'aurores
infusées dans des matins blêmes.

J'ai mal rêvé chez De Nerval,
licorne à la cravate au cou
si serrée que de mes nerfs valent
un nœud coulant que l'on secoue.

Dans les fameux châteaux brillants
sont des légendes éphémères,
et des bandits violant, pillant
les jeunes filles et leurs mères.

Dans le mot « spleen » de Baudelaire,
il y a l'épaisseur d'un livre
ouvert aux microbes de l'air
qui de leurs vains maux nous enivrent.

Le « cellulaire » de Verlaine
est une porte verrouillée :
depuis le crâne jusqu'à l'aine,
un sexe est un cerveau rouillé.

Quant aux « étés » d'Arthur Rimbaud,
j'en ai connu qu'au purgatoire
on ne sut plus qu'en faire un beau
cataplasme à tout exutoire.

J'ai saigné de veines de suies
que m'imposait l'autre Zola,
Tandis que me lavaient les pluies
d'éclatement de leurs zonas.

Nageant dans ces étangs de pus
— tant d'encriers aux miséreux —
j'écrivis donc tant que je pus,
si tant crier m'ait mis heureux.

J'ai reniflé l'odeur fétide
où l'auteur puise sa semence,
et sous les bras des cariatides
un brin de puanteur immense.

Ils se sont pris pour Montcorbier
mais n'ont pas su que nous voulons
le droit du verbe et son bourbier
quand on vient de François Villon.

mercredi 5 octobre 2016

La connue




Je n'aborderai plus les sujets maritimes
et je me méfierai des royaumes lacustres ;
en ne me baignant plus que dans ma mare intime,
on tuera les canards qui me traitent de rustre.

On dira de mon texte une ou deux conneries,
des vieux trucs hors contexte afin de m'oublier,
mais moi, de ton regard quand ta bouche sourit,
je resterai le rat des gouttières pliées.

Je resterai transi comme un vol avorté,
je resterai l'instant sur ta lèvre carmine
accroché par les mots comme un doigt sur la mine.

Il pressera dès lors le bouton dégoûté,
la goupille en mon cœur où sont décapités
les corps des poésies que ton ombre domine.